Un réseau pour guérir de l'anorexie et de la boulimie
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Un réseau pour guérir de l'anorexie et de la boulimie
Adèle, 13 ans, a beaucoup maigri.
Inquiets, ses parents consultent leur médecin. Celui-ci envoie la jeune
fille consulter un endocrinologue. Le diagnostic tombe : "anorexie
mentale", terme médical pour l'anorexie. La jeune fille est dirigée
vers un psychiatre. Semaine après semaine, Adèle continue de perdre du
poids.
Son anorexie a démarré il y a environ six mois. Elle dit s'être sentie "plutôt bouboule" et
a voulu commencer à perdre du poids. Elle a arrêté le grignotage, puis
les produits sucrés, les féculents... Ses parents sont désemparés.
Conseillés par la mère d'une camarade de classe, ils appellent un
service spécialisé. Adèle pèse 25 kg et mesure 1,42 mètre. Le médecin
décide de l'hospitaliser. En grande souffrance, Adèle a besoin qu'on
l'aide.
Face à l'anorexie ou à la boulimie, les parents ne savent pas à qui
s'adresser. Pour répondre à leur attente, un réseau sur les troubles du
comportement alimentaire (TCA) a été lancé au niveau de
l'Ile-de-France, vendredi 29 janvier. "Nous voulons coordonner les structures de soin des patients souffrant de TCA", explique son président, le professeur Jean-Claude Melchior,
nutritionniste à l'hôpital Raymond-Poincaré, à Garches
(Hauts-de-Seine). Les services hospitaliers spécialisés en TCA
d'Ile-de-France reçoivent plusieurs dizaines d'appels chaque jour. "Le traitement de ces pathologies est axé sur le travail pluridisciplinaire",
explique l'Association française pour le développement des approches
spécialisées des troubles du comportement alimentaire (Afdas-TCA)
Maladie complexe, l'anorexie mentale touche un nombre stable de
Français depuis plusieurs décennies. En revanche, même s'il n'existe
que peu d'études sur l'évolution des troubles alimentaires, "la fréquence de la boulimie augmente, notamment dans les zones urbaines", explique Nathalie Godart, pédopsychiatre à l'Institut mutualiste Montsouris, dans le 14e arrondissement de Paris. 1,5 % des femmes et 0,16 % des hommes souffriraient d'anorexie mentale. Elle touche 1 % des adolescentes ; et la boulimie 3 %.
Mais les autres troubles alimentaires, comme l'hyperphagie (se lever la
nuit pour dévaliser son frigo ou grignoter frénétiquement entre les
repas), progressent, et concerneraient 20 à 30 % des adolescents. Les
TCA frappent davantage la gent féminine : on compte huit à neuf filles
malades pour un garçon. En Ile-de-France, on dénombre 180 000 cas
d'anorexie mentale chez les femmes et 19 000 cas chez les hommes. Les
formes intermédiaires affectent 600 000 personnes, selon les chiffres
rendus publics vendredi 29 janvier par le réseau TCA d'Ile-de-France.
"Les troubles du comportement alimentaire, pas forcément sous leurs
formes les plus graves mais modérées ou transitoires, ont fortement
augmenté. Et particulièrement, depuis vingt ans, les crises de boulimie
suivies de vomissements provoqués, qui touchent aujourd'hui une à deux
jeunes filles sur dix", explique Xavier Pommereau,
psychiatre et responsable du Pôle aquitain de l'adolescence au CHU de
Bordeaux. Les causes de l'anorexie et des TCA sont multifactorielles
(prédisposition, culture, environnement, mode de vie, stress...).
Le contexte social est bien sûr déterminant. L'offre alimentaire
abondante, le matraquage publicitaire sur l'idéal de minceur, le temps
et l'importance moindres accordés aux repas... sont autant de facteurs
déclencheurs.
Aussi bien dans la boulimie que dans les autres TCA, c'est souvent
la pensée anorexique qui pilote les crises. Elles reviennent avec le
besoin de maigrir ou le sentiment insupportable d'être trop gros.
"Dans la boulimie, les patients confondent la faim et l'envie de
manger, souvent liée à des émotions qu'ils ne savent pas gérer
autrement. Toutes les émotions peuvent être sources de compulsions
alimentaires. Il faut apprendre à gérer les émotions autrement qu'avec
la nourriture", explique Anne-Françoise Chaperon, psychologue clinicienne spécialisée en thérapies cognitives et comportementales.
"Dans tous les cas, il y a la stigmatisation du corps non parfait", souligne Laurence Collet-Roth, psychologue. Selon une récente étude du psychiatre Christopher Fairburn, chercheur à Oxford (Angleterre) : "Les patients basculent souvent d'un trouble à l'autre. La symptomatologie des TCA peut être commune."
Point inquiétant : "La moitié des patients souffrant de TCA n'accèdent jamais à des soins",
insiste le professeur Jean-Claude Melchior. Surtout les personnes
atteintes de boulimie, puisque c'est le plus souvent une maladie non
visible.
Le retard de prise en charge a de multiples raisons : "Le
refus des patientes, qui restent focalisées sur leur volonté de perdre
du poids et craignent toute intervention qui s'y opposerait ; les
parents qui se sentent responsables dès lors que l'on évoque un
problème psychiatrique et sont parfois dans l'évitement ; le médecin
traitant qui a des connaissances souvent insuffisantes, énumère Renaud de Tournemire, pédiatre, responsable de l'unité de médecine de l'adolescent à l'hôpital de Poissy-Saint-Germain-en-Laye (Yvelines). Ainsi, lorsque la situation devient grave, les familles ont souvent déjà toqué à de multiples portes." Une perte de temps préjudiciable car, comme le souligne le docteur Nathalie Godart, "plus la prise en charge est précoce, meilleur est le pronostic de guérison". Même si la voie est longue et sinueuse, on peut en effet guérir de l'anorexie et de la boulimie.
Le Monde,
02.02.10
Inquiets, ses parents consultent leur médecin. Celui-ci envoie la jeune
fille consulter un endocrinologue. Le diagnostic tombe : "anorexie
mentale", terme médical pour l'anorexie. La jeune fille est dirigée
vers un psychiatre. Semaine après semaine, Adèle continue de perdre du
poids.
Son anorexie a démarré il y a environ six mois. Elle dit s'être sentie "plutôt bouboule" et
a voulu commencer à perdre du poids. Elle a arrêté le grignotage, puis
les produits sucrés, les féculents... Ses parents sont désemparés.
Conseillés par la mère d'une camarade de classe, ils appellent un
service spécialisé. Adèle pèse 25 kg et mesure 1,42 mètre. Le médecin
décide de l'hospitaliser. En grande souffrance, Adèle a besoin qu'on
l'aide.
Face à l'anorexie ou à la boulimie, les parents ne savent pas à qui
s'adresser. Pour répondre à leur attente, un réseau sur les troubles du
comportement alimentaire (TCA) a été lancé au niveau de
l'Ile-de-France, vendredi 29 janvier. "Nous voulons coordonner les structures de soin des patients souffrant de TCA", explique son président, le professeur Jean-Claude Melchior,
nutritionniste à l'hôpital Raymond-Poincaré, à Garches
(Hauts-de-Seine). Les services hospitaliers spécialisés en TCA
d'Ile-de-France reçoivent plusieurs dizaines d'appels chaque jour. "Le traitement de ces pathologies est axé sur le travail pluridisciplinaire",
explique l'Association française pour le développement des approches
spécialisées des troubles du comportement alimentaire (Afdas-TCA)
Maladie complexe, l'anorexie mentale touche un nombre stable de
Français depuis plusieurs décennies. En revanche, même s'il n'existe
que peu d'études sur l'évolution des troubles alimentaires, "la fréquence de la boulimie augmente, notamment dans les zones urbaines", explique Nathalie Godart, pédopsychiatre à l'Institut mutualiste Montsouris, dans le 14e arrondissement de Paris. 1,5 % des femmes et 0,16 % des hommes souffriraient d'anorexie mentale. Elle touche 1 % des adolescentes ; et la boulimie 3 %.
Mais les autres troubles alimentaires, comme l'hyperphagie (se lever la
nuit pour dévaliser son frigo ou grignoter frénétiquement entre les
repas), progressent, et concerneraient 20 à 30 % des adolescents. Les
TCA frappent davantage la gent féminine : on compte huit à neuf filles
malades pour un garçon. En Ile-de-France, on dénombre 180 000 cas
d'anorexie mentale chez les femmes et 19 000 cas chez les hommes. Les
formes intermédiaires affectent 600 000 personnes, selon les chiffres
rendus publics vendredi 29 janvier par le réseau TCA d'Ile-de-France.
"Les troubles du comportement alimentaire, pas forcément sous leurs
formes les plus graves mais modérées ou transitoires, ont fortement
augmenté. Et particulièrement, depuis vingt ans, les crises de boulimie
suivies de vomissements provoqués, qui touchent aujourd'hui une à deux
jeunes filles sur dix", explique Xavier Pommereau,
psychiatre et responsable du Pôle aquitain de l'adolescence au CHU de
Bordeaux. Les causes de l'anorexie et des TCA sont multifactorielles
(prédisposition, culture, environnement, mode de vie, stress...).
Le contexte social est bien sûr déterminant. L'offre alimentaire
abondante, le matraquage publicitaire sur l'idéal de minceur, le temps
et l'importance moindres accordés aux repas... sont autant de facteurs
déclencheurs.
Aussi bien dans la boulimie que dans les autres TCA, c'est souvent
la pensée anorexique qui pilote les crises. Elles reviennent avec le
besoin de maigrir ou le sentiment insupportable d'être trop gros.
"Dans la boulimie, les patients confondent la faim et l'envie de
manger, souvent liée à des émotions qu'ils ne savent pas gérer
autrement. Toutes les émotions peuvent être sources de compulsions
alimentaires. Il faut apprendre à gérer les émotions autrement qu'avec
la nourriture", explique Anne-Françoise Chaperon, psychologue clinicienne spécialisée en thérapies cognitives et comportementales.
"Dans tous les cas, il y a la stigmatisation du corps non parfait", souligne Laurence Collet-Roth, psychologue. Selon une récente étude du psychiatre Christopher Fairburn, chercheur à Oxford (Angleterre) : "Les patients basculent souvent d'un trouble à l'autre. La symptomatologie des TCA peut être commune."
Point inquiétant : "La moitié des patients souffrant de TCA n'accèdent jamais à des soins",
insiste le professeur Jean-Claude Melchior. Surtout les personnes
atteintes de boulimie, puisque c'est le plus souvent une maladie non
visible.
Le retard de prise en charge a de multiples raisons : "Le
refus des patientes, qui restent focalisées sur leur volonté de perdre
du poids et craignent toute intervention qui s'y opposerait ; les
parents qui se sentent responsables dès lors que l'on évoque un
problème psychiatrique et sont parfois dans l'évitement ; le médecin
traitant qui a des connaissances souvent insuffisantes, énumère Renaud de Tournemire, pédiatre, responsable de l'unité de médecine de l'adolescent à l'hôpital de Poissy-Saint-Germain-en-Laye (Yvelines). Ainsi, lorsque la situation devient grave, les familles ont souvent déjà toqué à de multiples portes." Une perte de temps préjudiciable car, comme le souligne le docteur Nathalie Godart, "plus la prise en charge est précoce, meilleur est le pronostic de guérison". Même si la voie est longue et sinueuse, on peut en effet guérir de l'anorexie et de la boulimie.
Le Monde,
02.02.10
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